UN MONDELE À BRAZZAVILLE


Pratiquement toujours accompagné d’un guide, mon voyage fut balisé dans les premiers jours. Puis n’aimant pas trop les distances avec les réalités qui m’entourent, je décide de me faire inviter dans la famille de l’assistant de la galerie. Un personnage habillé toujours chic, veste de couleurs vives, pantalon au pli marqué, ceinture et chaussures de cuir. Dans l’enceinte de la galerie il était très difficile d’imaginer sa réalité quotidienne. Alors un soir à la fin de la séance j’offre un taxi et nous partons en direction son quartier. La première surprise fut le noir sombre de la nuit, certain quartier bien qu’équipé de lampadaires était éteint pour des raisons d’équilibre de réseau électrique, nous avons donc traversé de petits embouteillages sur des routes boueuses une bonne demi-heure. Puis nous avons marché avec l’aide de la lumière du téléphone. Une petite cahute dans le coin d’une rue, les parents, des grands parents, des oncles, des frères, des sœurs, le feu au centre de la cours et une télé qui grésillait. Le temps d’échanger quelques mots avec sa famille, puis vient l’heure du retour. Toujours avec mon 5D à la main, 35mm, dans les nuits de Brazzaville. Un soir, nous avons pris une embarcation pour découvrir le fleuve Congo. Un soleil dans un ciel de bleus sombres, des grues au loin et les nuages gris. Le courant est fort, l’eau marron, le fleuve draine bon nombre d’objets, de bois, de l’autre côté Kinshasa qui brille à quelques km. On croise ces fameuses barques qui voyage sur le fleuve, mille objets débordent de l’engin, il flotte mais cela laisse pensif. Quelques familles vivent là sur de toutes petites iles. Une femme fait son linge, d’autres rentrent de la pêche, peu de poisson. La palette de couleurs de ce soir-là me reste encore intact.



Tant d’histoires me sont passés sous les yeux, tant de vie, tant de questions sur les traditions, tant sur les déséquilibres du monde… mille débuts de romans, mille récits d’aventuriers, tous passés par là, sur ce fameux fleuve aux esprits. L’eau qui défile, se regarde comme un film, on y voit son histoire. En sortant du bâtiment de la galerie, il avait une sorte d’impasse en terre ressemblant à un marché, la veille de mon départ j’y suis allé, les poches vident, seul, la caméra à la main. Marchant tranquillement vers le fond de l’allés. Il y avait beaucoup de monde habillé la plupart du temps avec des marques sportives plus ou moins raccommodés. Les femmes étaient drapées de couleurs. Quelques stands çà et là. Un jeune garçon arrive vers moi, il avait un œil abimé, habillé d’un marcel rouge déchiré, il me prévient de la dangerosité du lieu ; Ne reste pas là, « Mondele » ! c’est dangereux ici. Cherchant la sincérité dans son regard, je ne pus qu’accepter sa prévention. Je me permis quand même de m’arrêter sur une table d’épices, de tomates et de poissons séchés, accompagné du sourire de cette Mama aux angles arrondis et à l’humour universel, le moment que j’étais venu chercher était enfin arrivé. Pour une première fois en Afrique central, je suis marquer par le poids de l’histoire dans les trottoirs défoncés, les infrastructures délaissées. Les publicités gigantesques pour des multinationales, la routes 4 voies pour le palais présidentiel, en vrai et pur tarmac ; les maillots de foot Bayern, PSG, Barcelone, les magasins chinois en nombre avec mille milliards de références. Quelques heures avant l’avion, je prends le taxi et lui propose le reste de mes FCFA pour un tour illimité avant d’atteindre l’aéroport. Très bonne idée sur le papier, moins bonne dans la réalité à moins de tomber sur un bon chauffeur. Celui-là était sympa mais ne voulait pas comprendre mes intentions. Le moment clé fut cette traversée de la 4 voies, après un démarrage en seconde, j’ai vu la peur dans le regard du conducteur qui me fonçait  droit dessus. J’ai eu un moment d’adrénaline mais à ma grande surprise ceux sont des gendarmes qui se sont occupés de lui et j’ai dû changer de taxi. La dernière aventure avant l’avion. Pour méditer un magnifique A340, d’Air France qui décolla dans un brouillard dense ébloui d’orange, direction Paris.



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